Dans la présente partie, nous discuterons de propositions de nouveaux services que Postes Canada pourrait offrir en misant sur les visites à domicile et sa présence sur la route. Ces possibilités de nouveaux services s’appuient sur notre conviction que les forces traditionnelles de Postes Canada peuvent être exploitées à l’ère du numérique grâce à l’utilisation de la technologie mobile.
L’outil principal qu’utilisent les factrices et les facteurs urbains ainsi que les factrices et facteurs ruraux et suburbains (FFRS) pour le balayage de colis et autres envois repérables est le terminal de données portatif (TDP), un appareil mobile numérique. La prochaine génération de TDP comprendra une caméra ainsi qu’une connexion Internet mobile. Nous sommes d’avis que cette technologie permettra à Postes Canada de fournir plus facilement les services d’autres entreprises.[1] Voici quelques exemples de nouveaux services à domicile mettant à profit le TDP de nouvelle génération :
Tous les services décrits précédemment offrent la possibilité de créer de nouvelles sources de revenu pour Postes Canada en échange d’un investissement minimal. Il s’agit de services où le facteur ou la factrice effectue des tâches simples à titre d’entrepreneur pour le compte d’une tierce partie et lui envoie l’information à l’aide de son TDP. Ces services permettraient aussi aux entreprises qui les utilisent de mieux répartir leurs ressources vers des domaines d’intervention qui exigent un savoir-faire particulier.
Des TDP améliorés pourraient aussi être utilisés pour mieux exploiter le côté naturel de la « présence sur la route » des facteurs et factrices. Voici quelques exemples de ces nouveaux services :
Toutes ces propositions sont des moyens nouveaux et techniquement simples de créer de nouvelles sources de revenu.
En poussant encore plus loin le concept de « villes intelligentes », Postes Canada, qui détient le parc de véhicules le plus imposant au pays, pourrait tirer un meilleur parti de la présence de ses véhicules pour recueillir des données. Ainsi, la collecte de données de masse (big data) pourrait représenter une importante source de revenu. En installant des capteurs et de l’équipement photographique sur ses véhicules, Postes Canada pourrait surveiller la qualité du réseau routier, des ponts et des tunnels, et contribuer à la vérification du péage urbain dans les villes où cette mesure est en vigueur.
En plus de son offre accrue de services à domicile, Postes Canada devrait prolonger les heures de livraison pour mieux servir les clients.
Premièrement, pour Postes Canada, tout colis dont la livraison à domicile est effectuée avec succès à la première visite diminue les coûts liés à la préparation d’un avis de livraison et à la livraison du colis à un comptoir de vente au détail où il pourra être ramassé.
Dans le cadre d’un projet pilote syndical-patronal (STTP-Postes Canada) qui s’est déroulé à Winnipeg de 2002 à 2004, 90 % des livraisons effectuées le dimanche ont été fructueuses, soit un taux de réussite beaucoup plus élevée que celui des livraisons effectuées durant la semaine. Un sondage Léger Marketing a permis de constater que les clients avaient indiqué aux livreurs qu’ils étaient très satisfaits des livraisons effectuées la fin de semaine, tandis que 78 % des livreurs avaient indiqué que les tentatives de livraison la fin de semaine étaient très positives ou plutôt positives.
Deuxièmement, des périodes de livraison prolongées permettraient de mieux répartir les périodes de volumes élevés. Dans le cadre du projet pilote de Winnipeg, où les magasins des centres commerciaux recevaient des livraisons le dimanche, cette initiative a permis d’alléger le nombre de gros colis devant être livrés le lundi.
Troisièmement, durant les périodes de volumes moindres, les livraisons le soir et la fin de semaine pourraient s’effectuer à coûts réduits grâce aux nouveaux services fournis par les facteurs et factrices dont il a été question plus haut; un supplément serait sans doute facturé au client. Par exemple, une compagnie d’assurances pourrait vouloir que les visites aux clients qui font une réclamation aient lieu en soirée, lorsqu’ils sont à la maison, et elle pourrait être disposée à payer des frais additionnels pour ce service « d’exception ».
De plus, grâce aux livraisons effectuées le soir et la fin de semaine, les expéditeurs pourraient bénéficier de plages horaires particulières et fixées d’avance en contrepartie d’un supplément pour garantir la livraison d’un colis le soir ou la fin de semaine. Pour Postes Canada, ce service représenterait une nouvelle source de revenu.
La prolongation des heures de livraison pourrait aussi réduire le coût du service de livraison le jour même (« Livré ce soir ») en intégrant à ce service spécialisé d’autres colis à livrer en soirée.
Postes Canada n’offre pas de service de ramassage de colis à domicile sauf si un contrat commercial l’autorise à le faire. Les particuliers peuvent cependant utiliser son service d’expédition en un clic (Expédiclic), qui permet d’imprimer une étiquette de colis préaffranchi et de déposer le colis dans une boîte aux lettres publique ou à un comptoir postal.
La Poste offre un service de ramassage de petits colis directement de la boîte aux lettres des clients, alors que la poste australienne offre un service de ramassage de colis durant des plages horaires précises de quatre heures, et un service à tarif réduit pendant les heures creuses.[5]
Postes Canada devrait lancer un service de ramassage de colis à domicile. Ce service pourrait stimuler la demande ainsi que les achats en ligne, car bien des consommateurs ne font pas d’achats en ligne (de vêtements surtout) pour éviter de devoir se rendre au bureau de poste en cas de retour de la marchandise.
Un service de ramassage à domicile sans tracas pourrait par la suite être appliqué dans d’autres secteurs d’activité, comme le ramassage et la livraison d’équipement de sport et de bagages expédiés directement de la maison à la destination, et vice-versa. Aujourd’hui, ce service est très populaire au Japon, et il est fourni par le service postal public[6] et des entreprises de livraison de colis du secteur privé, dont Yamato Transport Company, un joueur important de ce secteur d’activité.
La livraison sept jours par semaine et en soirée permettrait à Postes Canada de faire l’expérience de la livraison d’aliments frais, périssables et congelés. Les administrations postales sont déjà en train de faire leur place dans ce domaine.
PostNord, au Danemark, effectue tous les mois 200 000 livraisons d’aliments à 125 000 adresses distinctes – un chiffre impressionnant pour un pays de moins de six millions d’habitants.[7] Elle fait des livraisons pour le compte de 215 commerces au détail de toutes sortes, allant de grandes chaînes d’alimentation nationales à de petits commerces spécialisés. Dans les centres urbains du Danemark, les titulaires d’un itinéraire motorisé, en plus des colis standards, livrent en soirée des produits alimentaires. Dans les régions rurales du Danemark, la livraison des aliments a lieu le jour dans le même véhicule que les colis et le courrier.
La Poste suisse livre aussi des produits alimentaires grâce à un partenariat avec la chaîne Migros, alors que Bpost effectue des livraisons pour le compte d’un large éventail de détaillants par l’entremise de son service combo, qui regroupe les commandes faites auprès de grands détaillants et de petits spécialistes dans une même visite de livraison en soirée.
Nous sommes d’avis que Postes Canada devrait lancer un projet pilote pour la livraison de produits alimentaires, ce qui lui permettrait à la fois de diversifier ses revenus et de se positionner avantageusement dans ce marché avant qu’il ne soit envahi par d’autres.
Postes Canada pourrait étudier plusieurs modèles de livraison de produits alimentaires. Un d’entre eux consisterait à simplement regrouper les livraisons d’aliments provenant de différents épiciers.
Elle pourrait aussi examiner le modèle où l’entreprise de livraison se sert de son importante infrastructure numérique pour permettre aux petits détaillants de vendre en ligne. L’entreprise de livraison perçoit une commission pour développer ou entretenir, ou les deux, le site Web de l’épicier et faire les livraisons. Il semble que Yamoto ait adopté ce modèle.[8]
Étant donné son immense capacité et son efficacité à trier des articles disparates pour le dernier kilomètre de livraison, Postes Canada serait peut-être en mesure d’offrir aux commerces locaux la possibilité d’expédier des articles (à tarifs concurrentiels) à des distances beaucoup plus grandes dans une région urbaine que les nouveaux venus ne peuvent le faire, eux qui ciblent uniquement les produits alimentaires et le dernier kilomètre de livraison. Ce service pourrait se concrétiser en combinant la livraison des produits alimentaires en soirée avec la livraison des colis en soirée.
Le Syndicat s’engage à mettre à l’essai la livraison de produits alimentaires.
Un autre service que Postes Canada devrait examiner de concert avec le STTP et les petits producteurs agricoles est le rôle qu’elle pourrait jouer (p. ex., support informatique, paiements, vente au détail et livraison) pour permettre aux petits producteurs d’expédier, de façon simple et à prix raisonnables, leurs produits agricoles aux ménages qui vivent en milieu urbain. Des variantes d’un tel service existent ailleurs dans le monde, un exemple étant Chronofresh en France. Étant donné l’évolution rapide de ce secteur (et de la technologie connexe), nous recommandons la tenue d’une recherche commune. Il convient de signaler que Postes Canada permet déjà l’expédition de produits périssables, tels les fruits frais.[9]
Il faudrait exiger de Postes Canada qu’elle examine comment elle pourrait s’y prendre pour rationaliser les activités des entrepreneurs des services routiers, combiner des parcours et récupérer le travail sous-traité. Un examen approfondi de l’espace disponible dans ses camions pourrait mettre en lumière l’espace inutilisé et donner lieu à des économies.
Compte tenu des embouteillages, qui augmentent les temps de déplacement, de la pollution atmosphérique et des coûts, Postes Canada devrait aussi être tenue de voir comment elle pourrait tirer parti de son réseau pour effectuer la livraison du dernier kilomètre pour le compte du secteur du transport des marchandises. En Belgique, BPost utilise une de ses installations située aux abords d’Anvers pour recevoir de la marchandise de partout en Europe. Elle utilise ensuite de plus petits véhicules pour distribuer les marchandises au centre-ville. De la même façon, il faudrait, au Canada, se pencher, à l’échelle nationale, sur la rationalisation de la livraison du dernier kilomètre, en y incluant autant que possible des colis en provenance d’autres entreprises.
La technologie évolue rapidement. S’il est vrai que les nouvelles mesures de rechange numériques causent des maux de tête aux administrations postales partout dans le monde, il est tout aussi vrai qu’elles leur ouvrent de vastes possibilités. La livraison des colis et les idées exposées dans le présent mémoire pourraient bien n’être que la pointe de l’iceberg du travail qu’effectueront les factrices et facteurs d’ici cinq ans. La meilleure façon de s’y retrouver, selon nous, serait d’inciter Postes Canada et son personnel à explorer conjointement les nouveaux procédés et les nouvelles technologies – tant au Canada qu’à l’étranger – et à entreprendre des projets pilotes syndicaux-patronaux faisant appel à de nouvelles technologies de manière à ce que ces initiatives bénéficient à la fois aux détenteurs de Postes Canada (la population) et aux travailleurs et travailleuses des postes et contribuent à la viabilité financière à long terme de la société d’État.
Il faut pour cela instaurer une culture de l’apprentissage à tous les paliers de Postes Canada, et cette culture doit miser sur la connaissance qu’ont les membres du STTP des problèmes locaux et des nouveaux services que Postes Canada pourrait offrir pour remédier à la situation. Les membres du STTP doivent avoir la possibilité de présenter des propositions de nouveaux services à mettre à l’essai dans leurs collectivités parce que ces services répondent aux besoins précis des gens qui y vivent. Le Syndicat propose que Postes Canada établisse des comités locaux mixtes qui proposeraient la mise à l’essai de nouveaux services au public et en feraient l’évaluation.
La factrice ou le facteur de l’avenir affecté au quart de soir, tant en région rurale qu’en région urbaine, pourrait très bien livrer des steaks frais à la résidence des Sanchez pour le souper, puis livrer chez Mme Ryan, leur voisine, le téléphone cellulaire qu’elle a commandé en ligne auprès du service « Livré ce soir », et dont elle a besoin pour son travail le lendemain, et ramasser, en même temps, la paire de souliers achetée en ligne qu’elle souhaite retourner, se rendre ensuite chez Mme Tremblay, qui habite dans l’immeuble à appartements non loin de là pour prendre des photos d’une fuite d’eau pour le compte de la municipalité, et, bien sûr, livrer les colis prévus à l’itinéraire de soir. En regroupant une variété de services, nouveaux et existants, en un seul système de livraison intelligent, Postes Canada s’assurerait de nouvelles sources de revenu.
Recommandation : Que Postes Canada maximise les nouvelles applications du TDP pour offrir de nouveaux services misant sur les visites à domicile et la présence des effectifs de livraison sur la route, et ce, pour le compte d’autres entités publiques et privées.
Recommandation : Que Postes Canada, en tant que propriétaire-exploitant du parc de véhicules le plus important au pays, fasse des analyses de rentabilité afin de maximiser sa capacité de collecte de données de masse à des fins publiques grâce à ses véhicules et aux facteurs et factrices.
Recommandation : Que Postes Canada propose un service de livraison de colis le soir et la fin de semaine.
Recommandation : Que Postes Canada propose un service de ramassage de colis à domicile sans obligation de contrat.
Recommandation : Que Postes Canada crée un projet pilote de livraison d’aliments périssables, y compris de produits surgelés.
Sous-recommandation : Parallèlement à cette mesure, que Postes Canada étudie les options qui lui permettraient de livrer directement aux ménages qui vivent en milieu urbain les produits des agriculteurs intéressés par un tel service.
Recommandation : Que Postes Canada, de concert avec le STTP, examine la possibilité de devenir l’agent de livraison du dernier kilomètre afin de réduire les embouteillages.
Recommandation : Que Postes Canada et le STTP surveillent de près les réalités internationales afin de cerner les nouveaux débouchés créés par les rapides changements technologiques qui continueront de se poser au secteur postal.
Recommandation : Que Postes Canada, de concert avec le STTP, établisse des comités locaux mixtes sur l’innovation pour mettre à l’essai de nouveaux services dans les collectivités du pays.
[1] En France, La Poste a fourni à tous ses facteurs et factrices un téléphone intelligent doté du système d’exploitation Android, ce qui leur permet d’offrir de nouveaux services.
[2] La Poste offre ce service.
[3] La Poste offre ce service.
[4] À bord de leur véhicule, les FFRS desservent 7 422 itinéraires et parcourent chaque jour 438 700 km.
[5]Voir: “Online postage (Click & send) service rates”. url: http://auspost.com.au/media/documents/Click-and-Send-service-rates-18Apr2016.pdf. Consulté le 5 juin 2016.
[6] Voir: http://www.post.japanpost.jp/service/you_pack/index_en.html . Consulté le 8 juin 2016.
[7] Source: Conversation avec un agent de PostNord (Danemark).
[8]Voir: “Enabling Online Supermarkets to Set Up Operations Cheaply Quickly and Widely Regardless of Operational Scale,” URL: https://www.yamatosolutions.com/english/solution/05/ . Consulté le 10 août 2016.
[9] « L’ABC de l’expédition – Guide des postes du Canada », p. 5. Société canadienne des postes. Mai 2016. https://www.canadapost.ca/tools/pg/manual/PGabcmail-f.pdf . Consulté le 11 août 2016.
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